🔴Pour le lecteur pressé, en moins de 3 minutes : https://youtu.be/P6euNSyla80
🔴 Pour découvrir ma critique vidéo complète, copier/coller "cinéma sans fard + À bout + Tyler Perry" sur YouTube !
👉 Et s'abonner à cette chaîne Youtube où je publie régulièrement ces articles, pour n'en rater aucun !🔴
Il y a des jours qui n’existent pas. Des moments trop épais pour être vécus. Straw (À bout) en est un. Le film — pas le mot, ou peut-être les deux. Une paille, oui. Quelque chose de creux, de souple, d’inoffensif, mais qui finit par rompre. Et tout bascule sur un matin sans drame : une mère, sa fille malade, un trajet banal. Puis les petites secousses s’enchaînent. Rien de spectaculaire. Juste le réel qui mord, qui racle, jusqu’à l’effondrement.
Tyler Perry délaisse ses tics larmoyants pour quelque chose de plus sec, plus sale. On pensait voir un drame social calibré Netflix, on reçoit une déflagration étouffée. Straw, c’est une crise d’angoisse qui dure 1h45. Pas de héros, pas de grand twist. Juste une descente. Une mise en tension permanente, sans exutoire.
L’intrigue est simple : une mère célibataire, des dettes, une gamine malade. Et la journée de trop. Les événements s’accumulent, petites humiliations, retards, silences. On pense à Falling Down, mais version sous Lexomil. Pas de vengeance ici, juste un abandon. La narration est rugueuse. Le rythme dysfonctionne, à dessein. Ça stagne, ça s’effondre. Pas de suspense classique, juste la peur sourde de la prochaine humiliation.
Original ? Pas vraiment. Mais c’est dans l’usure que le film brille. Il ne cherche pas à surprendre, il sape. Il répète, il insiste. Jusqu’à l’étouffement. On connaît ces situations, mais rarement filmées avec autant de sécheresse.
La mise en scène est minimale, presque plate. Perry pose sa caméra comme on observe un corps en chute. Pas d’esthétisation, pas d’effet. L’image est grise, laide, fatiguée. Le cadre sert le propos : une existence étranglée, sans horizon.
Et la lumière ? Dure. Plate. Blême. Elle écrase plus qu’elle n’éclaire. On sent que même le soleil est hostile. L’éclairage devient narratif : il renforce l’épuisement, l’impossibilité d’une échappée.
Côté jeu, Taraji P. Henson livre une performance affolante de retenue. Elle ne joue pas, elle s’efface. Elle fatigue à l’écran. Chaque mot, chaque regard semble lui coûter. Les autres gravitent autour, mais elle s’enfonce. Il n’y a pas de climax émotionnel — juste une lente disparition.
Entre les personnages, il n’y a presque plus de lien. Des gestes avortés, des mots mâchés. Même l’amour est sec. L’entraide est suspicieuse. Tout est silencieux, chargé, suspendu.
La bande-son ? Inexistante, presque. Pas de musique mélodique. Juste des bruits. Une toux, un klaxon, une minuterie déréglée. Le silence devient agressif. Le son, ici, n’accompagne rien. Il dérange.
Et pourtant, ça touche. Pas parce que c’est beau. Parce que c’est nu. L’émotion colle, sans pathos. Le film n’essaie pas de convaincre, il montre. Brut. Lentement.
Le message ? Aucun. Ou alors : voilà ce qu’on devient quand plus personne ne regarde. Ce n’est pas une dénonciation. C’est une exposition. Et c’est suffocant.
Note de 14 sur 20. Pour celles et ceux qui ne crient plus, mais qui veulent voir jusqu’où ça casse.