Il était un père, comme tous les films d'Ozu d'ailleurs, est un film qui fait du bien. Nous y suivons, comme l'indique le titre, une relation père/fils. Pour des raisons financières, ils sont obligés de vivre loin l'un de l'autre mais cela n'altère pas leur amour, le renforcerait plutôt.
Une des grandes qualités du film est son rythme, très rapide, avec beaucoup d'ellipses. En à peine 1h30, c'est presque une fresque que nous conte Ozu. C'est dû au montage, bien sûr, mais aussi à cette façon qu'a Ozu d'aller à l'essentiel. Si ses célèbres plans de caméra posée à hauteur de tatami sont d'une sobriété à toute épreuve, l'intrigue elle-même est un modèle d'épure, alors que les personnages sont pourtant, comme toujours, très bavards.
Mais ce qui m'a frappé en revoyant Il était un père (je pourrais, je crois, voir en boucle une grande partie de la filmographie d'Ozu), c'est le rapport au temps. De là vient la sensation de quiétude qui baigne le film. En occident, nous avons une notion d'un temps qui va de l'avant, d'où cette nécessité de profiter des instants, qui disparaîtront à jamais, car on ne se baigne jamais deux fois dans la même rivière.
Mais ici, le temps est cyclique, et les plans de pêche sont formels, même s'ils sont en fait asymétriques, on peut en fait se baigner deux fois dans cette rivière d'Héraclite, car à ce moment le film opérera les retrouvailles. Dès lors chaque moment est d'autant plus précieux qu'il ne disparaît jamais vraiment et l'expérience ne sert plus à éviter maintenant les écueils du é, mais plutôt à revivre ce qu'on a aimé, encore et encore.
Et donc, nulle nostalgie, puisque le é n'est jamais révolu. Il était un père s'avère ainsi d'une grande douceur et évite le ton mélodramatique : si on pleure le disparu aimé, on se rend bien vite compte qu'il est encore présent!
A noter la prestation de Chishu Ryu, qu'on reverra vingt ans encore dans les films de Yasushiro Ozu!